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Un sommet mafieux filmé : « de l’impuissance de la justice suisse »

Ce n’est pas la première fois que la police film un sommet mafieux. Souvenez vous mafias.fr vous avez livré cela : sommet mafieux dans le Nord de l’Italie. Mais c’est rare et c’est peut-être la première fois en Europe (hors Italie). En réalité, je suis certain qu’il existe d’autres vidéos dans les tiroirs des policiers mais il faut pas montrer cela aux populations…

Bravo donc à la police fédérale qui a piégé le mafieux à Frauenfeld, mafieux originaires de Fabrizia (Vibo Valentia). Mais ce qui est intéressant c’est que la justice suisse se plaint que la vidéo ait été diffusée par les autorités italiennes (cf.L’article de presse suisse).

Sous couvert de secret de l’instruction, la justice suisse aurait aimé continuer à enquêter… et pour cause, elle ne dispose pas des délits d’association mafieuse ni de la confiscation préventive antimafia… (cf. Ce n’est pas parce que la mafia existe toujours qu’il faut douter des moyens antimafias italiens.

Comment poursuivre des gens qui se réunissent et parlent de mafia et de drogue mais sans trouver la drogue?

D’autres liens :

Mafias.fr à Neuchâtel

Evènement en Suisse

Mémoire Camorra/socio-économie

Fraude, corruption, blanchiment. L’Europe braquée en permanence.

Compte rendu du colloque de l’année : Journées d’étude : citoyens contre criminalité économique

15 juillet 2014 | Par Bernard LeonMediapart.fr

mafia rizzoli antimafiaLa situation en matière d’évasion fiscale, de fraude et de criminalité financière en Europe, des mots qui recouvrent une réalité à plusieurs facettes, vous semblait, bien que lointaine, alarmante. Elle est en fait catastrophique. C’est l’avis des nombreux spécialistes  qui se sont réunis à Paris à l’invitation d’Alternatives Européennes, une association qui travaille pour l’innovation des pratiques démocratiques, dans le cadre du projet « Tackling Illegal Economy ».

Les risques sont sérieux pour la démocratie, la santé des Etats, l’avenir des échanges économiques.

Cela tient, comme l’a rappelé le Magistrat Jean de Maillard, Vice-président du TGI de Paris et auteur de « L’arnaque », publié chez Gallimard, au fait qu’une criminalité différente des maffias est désormais ancrée au coeur du système économique mondialisé, dont elle est devenue la variable d’ajustement et de régulation. Et ceci, il ne faut pas se le cacher, avec la complicité, ou au mieux l’indifférence, des gouvernements.

Plus l’économie va mal, moins les gouvernements ont les moyens d’agir. « Quand le système devient compliqué, le politique se retire et la finance prend le relais. Et plus la finance s’étend, plus la fraude prospère. Mais si la fraude devient systémique les institutions ne peuvent plus réagir. Et on en arrive à ce que les banques soient au dessus des normes, au dessus de la loi ». Trop grandes pour faire faillite, comme on dit. Trop grandes pour aller en prison également. Too big to jail.

Ce n’est pas une raison a dit Fabrice Rizzoli, (FLARE France), auteur du « Dictionnaire énervé des mafias », de parler du problème de manière fataliste, car il est possible, les italiens nous l’ont prouvé ces dernières années, de réagir.

Il prône donc au niveau européen ce qui a été réussi en Italie, la confiscation des patrimoines criminels au bénéfice de la communauté. (cf. Mucchielli)

Le voyage du Pape en Calabre a d’ailleurs mis en lumière la chose, puisque sa dénonciation de la maffia a permis de mettre les projecteurs sur Don Panizza, un prêtre qui a osé reprendre en 2002, à la demande du préfet, un immeuble de 3 étages confisqué par l’Etat à un clan familial de la maffia. Il en a fait un centre d’accueil pour mineurs en difficulté et adultes handicapés.

Voir reportage ci-dessous :

Mais il y a bien d’autres exemples, comme ces coopératives agricoles en Sicile exploitant les biens confisqués à la maffia dans le cadre de la loi de 1996.

Voir reportage ci-dessous

Une confiscation qui s’applique également aux complices des condamnés, ou encore à des personnes en possession de biens dont le caractère illicite des processus d’acquisition est avéré.

Voir reportage ci-dessous :

Fabrice Rizzoli rêve d’ailleurs tout haut de tenir une conférence sur le sujet dans la maison de Cahuzac en corse ou dans la villa de Ziad Takieddine. (Oui, celle avec la piscine là où se baignait J.F. Copé).

Un cancer au cœur de l’Europe.

Mais en amont des poursuites et des saisies il faut pouvoir enquêter en Europe. « Sauf qu’il manque toujours un parquet européen », dit Vittorio Agnoletto (Ancien membre du parlement européen). D’où la difficulté à poursuivre ceux qui fraudent ou qui sont complices de ces fraudes. Ce peut être un fonctionnaire européen, un fonctionnaire d’un des 27 pays membres gérant un fond structurel, ou encore une organisation criminelle de fraude. Sur la TVA ou les cotas de CO2 par exemple. Le trésor Français aurait perdu sur ces derniers 1,6 milliards d’euros, et l’Europe verrait s’envoler 100 milliards d’euros par an pour cause de fraude à la TVA.

Il existe bien depuis 1999 un Office européen de lutte antifraude, l’OLAF, pour enquêter. Mais le manque de coopération que cet office rencontre dans ses enquêtes, au sein des 27, et les failles juridiques nationales, constituent une entrave à son travail. Il ne lui est pas possible d’enquêter en Allemagne sur les fraudes à la TVA, par exemple.

Comme l’a dit Fabrice Rizzoli,  on est aussi face à un flou sémantique ou administratif sur les notions de « légal » et « illégal ». D’ou parfois une difficulté à poursuivre efficacement.

Un rapport du Sénateur Eric Bocquet de 2012 n’a-t-il pas pointé que « la fraude fiscale des entreprises françaises était principalement sanctionnée chez de petits entrepreneurs, alors que les enjeux financiers étaient plutôt du coté des grandes entreprises ». Mais ces dernières, entourées de cabinets conseils, jouent sur toutes les failles que leur offrent les réglementations des Etats, et échappent facilement aux taxes et à l’impôt.

Une voie pour la réutilisation sociale : l’ESS.

Relayant l’intervention de Darina Zalmova, de l’université de Thrace (Roumanie), qui a montré que la corruption devait être combattue par la reconstruction d’une pensée collective et des pratiques sociales, Marcel Hipszman, ancien adjoint au Délégué interministériel à l’économie sociale, a mis en lumière, tout comme elle, la possibilité pour l’économie Sociale et Solidaire d’être un outil anti corruption en se voyant confié la gestion des biens saisis à la criminalité financière. Un vrai recyclage au profit de la population, sous forme de musées, coopératives, centres d’apprentissage, établissements de soins, accueils des immigrés, etc.

Voir reportage suivant :

Il a rappelé les opportunités ouvertes par la récente directive européenne du mois d’avril sur le gel et la confiscation des produits de la criminalité transfrontière organisée. Tout en regrettant que les applications de cette directive en matière d’utilisation sociale des biens confisqués  ne soient pas obligatoires et laissées à la volonté des Etats.

A l’heure où la loi sur l’économie sociale est votée en France, l’idée est à creuser.

Il a également rappelé que la France possède une « Agence de gestion et recouvrement des avoirs saisis », regrettant aussi que le gouvernement ait annoncé que la question de la réutilisation à but social des biens confisqués serait discutée ultérieurement. Comme quoi on peut être un gouvernement de gauche et timide sur l’innovation juridique et sociale en matière de lutte contre la criminalité financière.

Un combat politique, social et culturel.

En fait, les intervenants l’ont tous dit, c’est bien là, sur le terrain politique, que doit être menée la vraie lutte citoyenne d’innovation démocratique. Un combat également culturel.

Ce qu’a bien montré le débat sur la presse d’investigation, réunissant plusieurs journalistes européens, dont Dan Israel de Médiapart.

Si les choses semblent  évoluer positivement, notamment grâce à la presse sur internet, les journalistes, s’ils sont confrontés à plusieurs difficultés, dont celles consistant à faire le tri des acteurs et des documents, doivent aussi faire face à la difficulté à vendre leur sujet contre la criminalité financière. En dehors de quelques affaires phares, il est plus facile pour un media de dramatiser un fait divers que de dérouler dans ses colonnes ou ses journaux télévisés les cheminements tortueux d’une fraude à la TVA, dont les montants sont pourtant vertigineux et lèsent les citoyens directement. Il faut donner du temps aux journalistes d’investigation. Les enquêtes sont longues, le recoupement des témoignages et la consultation d’experts nécessaires chronophages.

Mais la première difficulté vient, il ne faut pas avoir peur de le dire, des institutions, notamment bancaires. C’est par les banques que passe l’argent de la criminalité maffieuse, rapporte  Marius Frunza (Université Paris 1).

L’exemple de la banque anglaise HSBC qui a payé près de 2 milliards de dollars afin d’échapper à des poursuites aux Etats-Unis pour avoir blanchi l’argent des cartels de la drogue entre 2003 et 2010 en témoigne. En notant au passage que le patron de la banque pour la période incriminée est devenu en 2010 ministre de David Cameron. Humour anglais. Isn’t it ?

Alors que faire ? Les réponses ne peuvent être qu’internationales. Mais que fera l’Europe, présidée sous peu par l’ancien premier ministre d’un paradis fiscal, le Luxembourg ?  Que fera le Parlement européen ?

Restent aux citoyens à faire pression. Au travers d’associations comme Euroalter, ou Libera en Italie, dont le but est clairement de s’insurger et d’agir contre les maffieux, et qui regroupe 1600 associations  locales et internationales.

Itv JOL Presse : antimafia

Propos recueillis par Louise Michel D. pour JOL Press

Selon les chiffres d’un insitut statistique italien, la ‘Ndrangheta, la mafia calabraise, aurait engrangé 53 milliards de chiffres d’affaires sur l’année 2013: des entrées d’argent équivalentes à celles générés par la Deutsche Bank et McDonald’s réunis. Quelles sont les activités criminelles les plus fructueuses de cette puissante mafia? Quels sont les moyens développés par l’Italie pour la combattre? Explications de Fabrice Rizzoli, spécialiste de la criminalité organisée et des mafias, auteur du «Petit dictionnaire énervé de la mafia».

JOL Press : Selon les chiffres diffusé par institut, la‘Ndrangheta aurait engrangé 53 milliards de chiffres d’affaires sur l’année 2013. Quelles sont les activités criminelles les plus juteuses pour la mafia calabraise ?

Fabrice Rizzoli : La mafia calabraise engrange des milliards. Le trafic drogue est le premier facteur d’accumulation du capital : cela représente environ 40% des fonds engrangés par la mafia calabraise qui a fait du trafic de cocaïne sa spécialité. L’un des plus grands ports européens de transit de marchandises se trouve en Calabre : un atout majeur pour son trafic. Au-delà de la cocaïne, il y a des cultures de cannabis énormes en Calabre. Concernant les autres trafics, figurent la contrebande, le racket, et surtout les revenus de l’économie légale, puisque la mafia calabraise, comme la plupart des autres mafias blanchit son argent dans  l’économie légale, et gagne de l’argent. Rappelons que la mafia calabraise est aujourd’hui la plus puissante des quatre mafias italiennes : elle génère plus d’argent car elle a plus de membres et moins de collaborateurs de justice, ces  mafieux qui sortent du clan et qui témoignent devant la justice. Jusqu’en 1990, l’Etat italien a également concentré ses efforts sur la mafia sicilienne et moins sur la mafia calabraise.

JOL Press : En quoi la mafia calabraise freine-t-elle le développement économique de la région ?

Fabrice Rizzoli : Si l’on croit à l’économie de marché, et que l’on estime que l’un des points cardinaux de cette économie de marché repose sur la concurrence – qui permet de faire baisser les prix et de donner sa chance à tout le monde – on s’aperçoit que la mafia « tue » la concurrence. Un honnête entrepreneur qui veut créer un magasin de chaussures, n’a pas commencé à mettre la première pierre qu’il devra déjà verser de l’argent à la mafia. Les personnes ou entreprises qui refusent de payer, voient leur tracteur volé ou leur hangar brûlé. Ce climat-là ne peut pas être propice au développement économique de la région défavorisée.  Un énorme flux d’argent sale circule mais le niveau industriel et le niveau de service sont extrêmement faibles. L’état des routes est pitoyable, sans parler de celui des hôpitaux… Dans un pays riche –  cinquième puissance industrielle au monde et la troisième en Europe –  l’Italie du Sud affiche pourtant un développement extrêmement bas : la mafia y restreint les initiatives individuelles, freine l’esprit d’entreprendre, fait souffrir les entrepreneurs, et rend complice les comptables, les banquiers, les avocats…

JOL Press : Combien la mafia calabraise compte-t-elle aujourd’hui d’affiliés ? Est-il facile de l’infiltrer ?

Fabrice Rizzoli : Selon mes sources, la mafia calabraise regrouperait aujourd’hui 7500 affiliés. La mafia calabraise comporte une spécificité par rapport aux autres mafias : pour y entrer il faut avoir un lien de sang : il faut être fils de, frère de, ou marié à la fille ou encore à la soeur d’un mafieux.  Par les enfants communs, les sangs des deux familles –celle qui n’était pas de la mafia et celle qui en faisait partie – se mélange et on accepte la filiation.

Il faut savoir que l’on n’ « infiltre » pas les mafias. Il existe cependant des méthodes qui permettent de connaître la mafia : le témoignage de l’intérieur. Ceux qui ont une carrière professionnelle de mafieux pendant dix, quinze ans, sont protégés par la police, mais témoigner sur tous leurs avoirs, déclarer tous leurs biens, sinon ils perdent leur protection. Environ 3000 mafieux sont sortis du système depuis 1991 : ils témoignent à tous les procès, répondent aux journalistes et aux chercheurs. On connaît très bien le phénomène mafieux, mais un peu moins, la mafia calabraise, car nous avons moins de collaborateurs de justice.

JOL Press: Le Pape François s’est lancé dans une véritable lutte anti-mafia, en appelant à la mobilisation de la population. Comment l’Etat italien combat-il concrètement la mafia ?

Fabrice Rizzoli : L’Italie a les meilleurs outils juridiques au monde pour lutter contre la mafia, de telle sorte qu’une commission parlementaire européenne a travaillé pendant 18 mois et a demandé aux Etats membres de s’inspirer de l’Italie. On parle de la mafia italienne, mais on ne parle pas beaucoup des autres mafias en Europe. La mesure phare mise en place par le gouvernement italien vise à confisquer des biens et les redonner à la société civile. En Calabre, le terrain agricole d’un mafieux est ainsi transformé en une coopérative qui produit des olives. Il faut savoir que les mafieux préfèreraient être jetés en prison plutôt qu’on leur confisque leurs biens. Pour eux, la prison est une épreuve de virilité. « Quel homme d’honneur serais-je si je ne jamais fait un jour de prison ? » disent-ils. Ils détestent qu’on leur confisque leur bien, mais encore plus lorsque ceux-ci ont été transformés en associations, centres culturels, coopératives : car l’Etat arrive à montrer qu’il est plus fort que le pouvoir mafieux. La confiscation sans condamnation pénale du propriétaire est la clé de la lutte anti-mafia.

JOL Press: Les mafieux arrivent-ils vraiment à se repentir ou bien le risque de rechute est-il élevé ?

Fabrice Rizzoli : Il y a extrêmement peu de rechute en Italie, puisque c’est de l’ordre de 5%. Il arrive que certains mafieux craquent psychologiquement sur leur nouvelle vie – à force d’être isolés dans le nord de l’Italie, dans une petite commune, à gagner 1200 euros par mois alors qu’ils brassaient des centaines milliers – et qu’ils rechutent en faisant un trafic par exemple. Mais lorsqu’un mafieux a quitté son clan, témoigné contre lui, c’est extrêmement dangereux pour lui de retourner dans sa ville d’origine de tenter de reprendre le pouvoir mafieux. Certains l’ont payé de leur vie.

JOL Press: Comment expliquer l’implantation de la mafia italienne en France : est-ce juste un lieu de repli ou est-ce également un lieu de blanchiment ?

Fabrice Rizzoli : La France est effectivement un lieu de refuge pour la mafia italienne. Dans les années 80, lorsqu’il y avait des guerres de mafias calabraises qui ont fait des milliers de morts, des mafieux venaient se réfugier en France pour ne pas être assassinés, ni se faire arrêter par la police italienne. Ils profitaient ainsi de la diaspora puisqu’il y a une très grande communauté calabraise sur la Côte d’Azur. Ils peuvent faire du trafic : l’année dernière, un laboratoire de cocaïne a par exemple été démantelé sur les hauteurs de Nice. Les mafieux italo-français ont donc le monopole de l’approvisionnement de la cocaïne sur la Côte d’Azur et dealent avec les cités françaises. La France est également une terre de blanchiment.


Mafias italiennes et grandes surfaces… par fabricerizzoli

Propos recueillis par Louise Michel D. pour JOL Press

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Fabrice Rizzoli est docteur en science politique, spécialiste de la criminalité organisée et des mafias. Il a été secrétaire général de l’Observatoire géopolitique des criminalités de 2008 à 2012 et est responsable du bureau FLARE Network France. Il intervient régulièrement comme conférencier sur ces thèmes et a écrit Le petit dictionnaire énervé de la mafia, Les Editions de l’Opportun, 2012.

ITV le Petit Nicois

La pègre n’a plus de secret pour lui. Fabrice Rizzoli, docteur en science politique et représentant de FLARE, réseau européen de la société civile contre le crime organisé transnational, est aujourd’hui l’un des plus grands experts en la matière. Du Mexique en passant par l’Italie, le monde entier s’arrache ses conseils avisés.

Le Petit Niçois : Quelle est votre propre définition du mot mafia ?
Fabrice Rizzoli : La mafia est une entité politique qui exerce une souveraineté sur un territoire. S’adaptant aux changements socio-économiques, elle structure et perpétue à partir de cette « seigneurie territoriale » un système fondé sur une violence systémique qui lui permet de contrôler le territoire. La mafia gère un réseau vaste et ramifié de complicités au point de former un corps social : la bourgeoisie mafieuse. Elle anime un code culturel enraciné mais souple et jouit d’un relatif consensus social de la part de la population….

L.P.N. : Avez-vous été surpris en apprenant l’arrestation, la semaine dernière, de camorristes à Nice et d’un membre de la ‘Ndrangheta à Menton ?
F.R. : Non. Tous les ans, des chefs mafieux sont arrêtés en France et en particulier sur la Côte d’Azur, lieu d’implantation historique des mafias italiennes. Si la France accepte de livrer les mafieux italiens, en revanche, que fait-elle contre le blanchiment ?
Pour mémoire, il aura fallu attendre 10 ans de procédure avant que la justice italienne ne puisse saisir la villa au Cap d’Antibes ( en photo sur la version papier ) du trafiquant de drogue, Biagio Crisafulli ! Ce puissant soldat de la mafia sicilienne avait été arrêté à Nice en 1995.

L.P.N. : Qu’est devenu ce bien immobilier ?
F.R. : Je m’y suis rendu l’été dernier pour le voir de mes propres yeux. La maison a été revendue. La question que je me pose est donc la suivante : pourquoi aucun journaliste n’a daigné faire un papier sur cette villa qui aurait pu devenir un centre contre la corruption ?

La suite : Petit Niçois


"Le clan des calabrais" (EDR – 24.05.2013) par france3cotedazur

2 articles : l’organisation de la transgression : formaliser l’informel ?

mafia rizzoli antimafiaLes actes de la journée d’étude du 29 mars 2013 au CNAM le vendredi 29 mars, est sorti. Vous pouvez l’acheter ICI

Cette journée traitait de l’organisation de la transgression : formaliser l’informel ?

The organisation of transgression: formalising the informal?

Mafias.fr participa à deux communications :

–  La réutilisation à des fins sociales des biens mal acquis en Italie : de l’informel mafieux au formel citoyen avec Fabrice RIZZOLI, docteur en sciences politiques et Niccolò MIGNEMI, docteurs de l’EHESS (CRH – ERHIMOR).

Le cannabis social club (club privé de consommateurs : un exemple intelligible de régulation de l’informel ? avec Fabrice RIZZOLI,  docteur en sciences politiques et Laurent APPEL, membre de l’Observatoire Géopolitique des Criminalités, coordinateur pour la réforme de la politique des drogues de l’association 2013 ASUD mais aussi avec la précieuse contribution de Sonny Perseil.

Mafias.fr dans un lycée de Marseille

Antimafia à Marseille

de Marino Ficco, bénévole de LIbera France

mafia rizzoli antimafia

Don Bosco lycée

« La mafia est-elle également présente à Marseille ? »  (cf. Mafias.fr fait don de ses solutions) demande, soucieux, un étudiant du Lycée don Bosco de Marseille.

C’est la Saint Valentin, et nous nous trouvons dans le chef-lieu de la Provence, qui résonne dans l’actualité pour les nombreux meurtres, règlements de comptes et problèmes de criminalité en lien avec le trafic de drogue (cf. Règlements de compte à Marseille sur fond de trafic de stupéfiants.

Nous sommes ici car Valérie, professeur d’Italien du lycée don Bosco, souhaite sensibiliser ses élèves aux thématiques liées à l’antimafia en Italie. Aussi a-t-elle invité quatre membres de Libera France, l’antenne parisienne de l’association Libera qui s’occupe de la lutte contre les mafias et de la promotion de la légalité depuis 1995 en Italie.

Don Bosco Lycée Marseille

Don Bosco Lycée

Si l’on s’en tient à ce que relate la presse française, la réponse à la question du garçon serait presque automatique : cinq meurtres pour règlements de comptes depuis le premier janvier, les « quartiers nord » de plus en plus en proie aux trafiquants et au banditismeet l’absence de politique locale contre la criminalité parlent très clairement… Marseille est dans une situation dangereuse. Marseille est dans les mains de la criminalité organisée française et étrangère.

Mais que répondre à cet élève? Il a précisément employé le terme « mafia ». Un tabou en France, hors des débats ponctuels. Nous avons également rencontré un magistrat français expert des dynamiques de la criminalité organisée en France. « Marseille n’a rien à voir avec la mafia qu’on connaît en Italie », commence-t-il. Dans le cas de la France, « on peut parler de banditisme « lourd » et bien organisé. La seule analogie qu’on puisse faire avec l’Italie c’est le cas de la malavita napolitaine ».

mafia rizzoli antimafia

Fabrice Rizzoli

Fabrice Rizzoli, représentant de FLARE en France et expert de la mafia italienne, soutient que sans la présence capillaire d’associations de citoyens sur le territoire national, le problème se résoudra très difficilement.(cf. Revue Politique et Parlementaire)

Effectivement, chacun peut constater la grande quantité d’associations de quartier dont le siège se situe dans les quartiers nord de Marseille. Cependant, il s’agit de nombreuses petites associations dont la portée, bien que fondamentale, est limitée au niveau local. Et contre cette criminalité de plus en plus transnationale, les associations locales s’avèrent peu efficaces.

Un autre élève, qui préfère rester anonyme, nous a raconté avec fierté que sa mère, qui tient un magasin dans le centre-ville à Marseille, serait la seule à ne pas payer le « pizzo » ou racket à la criminalité du quartier. (cf. Soirée main basse sur Marseille… )

Nous avons posé quelques questions aux employés de nombreux magasins du quartier du Vieux-Port et Opéra. Mais personne ne dit connaître ces phénomènes de racket en ville. « Une trouvaille publicitaire de la mère du garçon?« , me suggère un commerçant sceptique. Pourtant, il est de notoriété publique que la brasserie David, qui a pignon sur rue dans la célèbre Corniche, a été incendiée deux fois ces deux dernières années (photo à droite). Et les enquêteurs parlent d’incendi criminel. En outre, une autre femme, qui préfère rester anonyme, nous a raconté que les propriétaires de beaucoup de brasseries et cafés de la Plaine sont victimes du racket. Ils sont obligés par la criminalité d’installer des machines à jouer.

Le David à Marseille
Le David à Marseille

En venant de Paris, la capitale depuis toujours méfiante envers la plus ancienne ville de France et le port principal de la Méditerranée, nous nous attendions à voir une ville dégradée et dangereuse. Au contraire, nous n’avons rencontré aucun danger. Est-ce donc la presse qui invente tout cela afin d’augmenter les ventes? Pourquoi les rédactions parisiennes ne donnent-elles pas autant de place à la criminalité en Ile-de-France, plus importante et tout aussi dangereuse ? Cette manière de faire du journalisme semble dangereuse car au lieu d’éteindre un malaise social, elle augmente la honte des citoyens honnêtes, qui se replient sur eux-mêmes. Ainsi Marseille apparaît-elle de plus en plus isolée. Ce que l’on peut observer facilement, c’est le choix politique de diviser Marseille en deux parties: d’un côté la zone touristique, du centre historique, à l’est de la Canebière, la capitale de la culture 2013 sûre, tranquille et dynamique; de l’autre côté la zone des quartiers nord où se concentrent les logements populaires, où se niche la pauvreté, où les associations de quartier déplorent l’absence de l’Etat.

Les bénévoles de Libera et les élèves à Marseille
Les bénévoles de Libera et les élèves à Marseille

La sensation est vraiment celle-ci. Celle d’une sorte de ghettoïsation des quartiers aux ouest nord: du treizième au seizième arrondissement. Où un tiers de la population essaie de survivre. Il ne faut pas oublier que Marseille est le chef-lieu de la PACA et qu’elle ne se réduit pas aux quartiers centraux où se promènent les touristes et on vote UMP. Marseille s’étend de l’Estaque aux calanques. Un défi que le prochain maire de la cité phocéenne devra savoir relever. Malgré le pessimisme qui transparaissait au gré de nos rencontres avec les citoyens, qu’ils fussent jeunes ou âgés.

La rencontre au lycée technologique don Bosco a duré deux heures et demie environ. À peu près soixante-dix garçons et trois filles ont écouté avec l’attention typique des assemblées de lycéens quatre interventions très différentes mais avec un fil directeur commun : la criminalité ne peut rien quand toute la société civile décide de s’y opposer. Pour briser la glace, Fabrice Rizzoli a présenté le cas emblématique du modus operandi de la ‘Ndrangheta à travers des scènes de documentaires et de reportages choisies et commentées (cf. Vengeance transversale ou conséquence de la mondialisation?.

Pio La Torre

Super Concetta

Ensuite, Concetta Savarise a brièvement rappelé la biographie et les actions des personnages les plus importants de la lutte contre les mafias en Italie dont Pio Latorre, le père de la confiscation. Chiara Zappalà a analysé et décrypté une scène du backstage du film Gomorra, l’adaptation cinématographique du roman de Roberto Saviano. (cf. Journée de la liberté de la presse : merci Robert)

Enfin, nous avons invité les lycéens à agir à travers la présentation de l’association Libera et des activités qu’elle organise en été. En effet, de mai à septembre, les jeunes peuvent se rendre seuls ou en groupe dans de nombreuses coopératives sociales qui produisent des biens alimentaires biologiques et de qualité (huile, confitures, conserves, pâtes etc.) dans des terres et des locaux qui auparavant appartenaient aux mafieux et qui leur ont été confisqués par l’Etat. (cf. L’arme qui peut tuer la mafia : la réutilisation des biens confisqués).

Ici on agit concrètement pour promouvoir la légalité et pour témoigner que sans les mafias la vie est meilleure. Après le travail dans les champs ou en coopérative, les jeunes dialoguent avec des professionnels et des citoyens qui ont décidé de consacrer leur vie à la promotion de la légalité et à la lutte contre mafias. Une expérience enthousiasmante et très enrichissante (cf. La redistribution à des fins sociales des biens confisqués aux mafias en Italie)

Pour participer, il suffit de s’inscrire dans le site www.libera.it ou de contacter Libera France (Facebook ou via mail Libera.parigi@gmail.com).

Nous avons décidé de ne pas imiter la plupart des journalistes qui pour réaliser un reportage sur Marseille vont visiter le quartier « Croix-Rouge » en compagnie de quelques agents de la police et du président de l’association locale pour prendre quelques photos et constater le délabrement et l’abandon de la part de l’État des quartiers nord pour puis conclure avec la description de la fuite héroïque vers la civilisation escortés par les gendarmes, pendant que des délinquants impitoyables leur lancent des pierres en les insultant.

Trop de reportages, parmi lesquels certains sont aussi très bien faits, languissent ignorés ou manipulés dans le web et dans la presse. Il nous semblait juste d’orienter les projecteurs vers d’autres questions, que souvent la presse oublie ou décide d’omettre. Il est trop facile d’accuser les familles issues de l’immigration qui vivent dans les quartiers nord de tous les problèmes de Marseille.

Samedi soir, au coucher du soleil, nous nous réjouissons du panorama superbe que nous offre la basilique de Notre- Dame de le Garde sur toute la ville. Ici on a l’impression de pouvoir dominer Marseille. D’ici on voit bien le port le plus ancien de la France, fondé il y a 2600 ans suite au mariage entre un Turc et une Ligure, Protis et Gyptis. Au milieu, la protagoniste est la Maison de la Méditerranée. Cela nous rappelle que ce côté de la Méditerranée est encore synonyme de maison et d’espoir pour beaucoup qui sont nés au-delà de l’étroit de Gibraltar. Quand on visite Marseille, on trouve une belle ville généreuse et ambitieuse qui essaie de devenir la capitale de la Méditerranée. On trouve une ville qui a été fondée par des étrangers et qui s’est développée grâce au mélange des cultures qui l’habitent depuis toujours. C’est maintenant que Marseille doit agir et décider de renier son histoire ou de s’en inspirer pour résoudre les problèmes d’une ville et d’un pays. «La mafia est-elle également présente à Marseille ? » Sans le consentement de la société civile, la criminalité et les mafias ne peuvent rien. Aujourd’hui, les Marseillais ont l’occasion de prendre l’initiative les premiers et de réveiller les consciences d’un Continent à travers une association citoyenne prête à parcourir les rues pour écouter et sensibiliser. On pourrait organiser des festivals et des activités culturelles pour relier l’ouest de Marseille avec l’est.

Est-ce qu’on réussira à vaincre les mafias ? Le juge italien Giovanni Falcone, le père de l’antimafia, qui fut tué en 1992, disait :

« la mafia est un phénomène humain et comme tout phénomène humain naît, grandit et meurt. »

Marino Ficco

Le mémoire sur la confiscation en Italie et en France : 18/20

Sebastian Stella, a suivi les enseignements du Master II « Lutte contre la criminalité financière et organisée » au Centre d’Etudes des Techniques Financières et d’Ingénierie (www.cetfi.org). Il a récemment écrit un mémoire sur la confiscation en Italie et en France qui a obtenu la note de 18 sur 20. Il a aussi effectué un stage au Parquet de Turin, dans le groupe « blanchiment et affaires connexes » (Riciclaggio e materie affini).

Faculté d’Economie et de Gestion & Faculté de Droit
         Centre d’Etudes des Techniques Financières et d’Ingénierie – CETFI
               Centre de Recherche en Matière Pénale Fernand Boulan
Groupe Européen de Recherche sur la Délinquance Financière et la Criminalité Organisée

Ce travail découle d’une grande admiration pour le Juge Giovanni Falcone (cf. 23 mai 1992 : la mafia tue Giovanni Falcone)  ainsi que de l’aide précieuse de spécialistes dont notamment Alberto Perduca, procureur adjoint au parquet de Turin, Claude Ducouloux-Favard (d’une trés grande gentillesse cf. Le livre pour les étudiants ) et de l’aide de Fabrice Rizzoli.

Vous pouvez consulter ce mémoire : « l’essor des instruments de saisie et de confiscation face à l’extension des mafias italiennes en France »

Mafias.fr dans la Revue Politique et Parlementaire

Le 18 juin 2010, l’Office des nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC) déclare que le crime organisé constitue une menace pour l’ordre mondial.
Pour la première fois, une instance de cet acabit évalue le crime organisé à sa juste valeur….

Retrouvez un article de Fabrice Rizzoli dans la Revue Politique et Parlementaire, 2ème semestre 2013

1. Contre le crime organisé en Europe : une justice audacieuse

2. La nécessaire implication de la société civile dans l’exécution d’une prérogative régalienne

 

 

Marseille : Mafias.fr fait don de ses solutions

Marseille : des idées pour lutter contre la « mafia »

Fabrice Rizzoli |Docteur en sciences politiques, Fabrice Rizzoli enseigne dans plusieurs établissements universitaires et anime le site Les Mafias, analyse au quotidien d’un phénomène complexe.,
Il représente en France le réseau Flare (Freedom legality and rights in Europe) contre la criminalité organisée transnationale, qui milite pour la réutilisation à des fins sociales des biens confisqués au crime organisé
Auteur du « Petit dictionnaire énervé de la mafia » (éd. de l’Opportun, 2012). Rue89

Avec treize règlements de comptes en 2013, les Bouches-du-Rhône occuperaient la tête du classement en France, avec une brusque accélération ces dernières années. On désigne le trafic de stupéfiants mais le manque de repères est visible à tous les échelons du pouvoir.

La réponse de l’Etat est souvent la même : un déplacement et une promesse d’effectifs policiers supplémentaires. A l’échelle locale, les élus demandent une militarisation du territoire (intervention de l’armée, doublement des effectifs ou des pistolets pour policiers municipaux).

A mettre au crédit du gouvernement de gauche : une vision moins caricaturale des quartiers populaires, ce qui l’amène à proposer une « approche globale » qui inclut un contrôle du territoire (CRS à l’entrée des cités), un peu de prévention (enlèvement des carcasses de voitures) et la tentative d’améliorer la situation socio-économique de ces quartiers.

Mais une contradiction demeure insurmontable. Pour la première fois, le politique parle de « mafia » en Corse et à Marseille mais ne propose aucun moyen antimafias.

Face à un problème structurel – le crime organisé – l’Etat pourrait expérimenter des outils qui ont déjà fait leurs preuves dans d’autres pays ; à condition de rompre avec une vision jacobine et prohibitionniste d’un autre temps.

« Sous-développement organisé »

Les données socio-économiques de Marseille dressent le portrait d’une ville pauvre, avec des quartiers nord touchés par l’échec scolaire et le chômage, malgré un arrière-pays très riche.

Les inégalités sociales visibles génèrent d’importantes frustrations et mis à part la perspective d’un emploi public, la population de Marseille souffre d’un manque de services et de projet politique. Non loin des villas avec piscine et des yachts, il s’est mis en place, dans les quartiers populaires, une « économie de la pauvreté ».

Les caïds y trouvent une main-d’œuvre disponible pour occuper les fonctions de guetteur et de vendeur, souvent mineure, ainsi que des « nourrices » qui cachent les stupéfiants dans leur appartement.

Un crime organisé trés puissant

A Marseille, il y a le grand crime organisé et les aspirants.

Les « grands » du milieu utilisent parfois la violence, comme dans la tuerie des marronniers ou l’élimination de Roland Gaben, mais avec parcimonie. Et pour cause, les grands ont un pied dans la légalité, comme en témoignent les affaires Campanella-Baresi, la fraude à la taxe carbone ou les trafics internationaux.

Le grand banditisme français, basé en Espagne, bénéficie d’une large impunité. Il se contente de distribuer la drogue à des semi-grossistes, contrôle les débits de boisson où l’on vend de la drogue, perçoit une quote-part sur les bénéfices et a abandonné le secteur du cannabis aux cités.

Les dealers du bas de l’échelle s’entretiennent avec des places de ventes, des dettes de cannabis et des « carottages ». La violence est parfois trompeuse. L’éclat à la kalachnikov n’est pas toujours en relation avec la puissance économique.

L’Etat français ne fait pas sa part

La lutte contre les grands caïds n’est pas efficace. En dépit des saisies et des arrestations, le cycle continue. Pourquoi un jeune de Marseille ne tenterait pas sa chance par tous les moyens ? Il sait que l’Etat ne fait pas sa part. Parmi les insuffisances à déplorer :

  • une absence d’indépendance à tous les échelons de l’enquête (procureurs, officiers de police judiciaire) qui entraîne peu de procès complexes ;
  • le manque de témoignages de l’intérieur, en raison de l’absence d’un statut de coopérateur de justice – prévu par la loi Perben, mais sans décret d’application ;
  • une protection des témoins inexistante (pour les témoins criminels comme pour les témoins victimes, comme les commerçants rackettés) ;

En Italie, la coopération du criminel ou du témoin avec l’Etat est encadrée par la loi et sous la seule responsabilité d’un procureur indépendant : quelle leçon de démocratie ! L’Etat français ne fait pas sa part en matière de justice car il ne condamne presque jamais ses élites corrompues.

Pour un Cannabis social club à Marseille

A Marseille comme ailleurs, le cannabis est la drogue la plus consommée. La plupart des usagers ne consomment que ce produit mais sont obligés de l’acheter à des trafiquants, ce qui enrichit ces derniers et leur donne une place légitime dans la société.

Le trafiquant marseillais est celui qui répare une injustice : celle d’un Etat qui réprime la consommation d’une substance pourtant disponible (qui existe en grande quantité) et accessible (facile à trouver), et ce en dépit d’une prohibition féroce (sanction pénale la plus élevée d’Europe).

A Marseille comme à Anvers ou aux Pays-Bas, les citoyens consommateurs doivent pouvoir faire partie d’une association à but non lucratif déclarée en préfecture et passer un contrat avec un producteur local de cannabis pour consommer. Un Cannabis social clubà Marseille améliorerait la santé publique et la vie sociale des usagers, financerait la prévention, l’éducation sanitaire et l’assistance en cas d’abus.

Enfin et surtout, il limiterait le poids des organisations criminelles dans la production et la distribution. Mais l’avantage le plus important d’une telle régulation est la séparation entre l’usage de drogue et le trafiquant, mettant fin ainsi à une symbiose néfaste pour l’application de l’ordre public.

Confisquer et réutiliser les biens du crime

En France, on confisque les biens du crime organisé de manière incomplète, en raison d’un cadre restrictif qui contraint les magistrats à prouver le lien entre le bien saisi et l’infraction.

En attendant de nous mettre au niveau de l’Italie (nombreuses confiscations sans condamnation pénale du propriétaire), il faudrait voter au plus vite une loi de réutilisation sociale de ces biens.

Au lieu de vendre aux enchères la villa du trafiquant de drogue, elle doit revenir à l’intérêt général. Certes, certains biens issus du trafic de stupéfiants sont parfois réaffectés vers les forces de l’ordre. Mais moderniser le parc automobile de la police grâce à la confiscation ne permet pas de lutter contre le consensus social des gangsters.

Une loi permettrait de recycler ces biens au profit de la population et d’animer l’économie sociale et solidaire : les maisons des criminels pourraient être transformées en centres culturels ou d’apprentissage, en établissements de soins pour les toxicomanes ou en lieux d’hébergement pour les immigrés.

Le patron d’une grande brasserie d’Aix-en-Provence est accusé de blanchiment pour le compte du clan Barresi-Campanella. L’établissement doit être confisqué pour y accueillir les jeunes des quartiers aux universités d’été de la lutte contre la corruption.

La réutilisation à des fins culturelles des biens saisis aurait une très forte valeur symbolique et pédagogique. Elle permet de détruire le capital social du crime organisé et confère à l’Etat son autorité auprès des populations qui se réapproprient le fruit du trafic. Dans sa ville, le citoyen qui passe devant le bien devenu utile peut se dire : « Pour une fois, le crime ne paie pas. » C’est, enfin, la seule manière d’impliquer la société civile dans une prérogative régalienne.

Après un an de travaux, la Commission européenne contre le crime organisé, la corruption et le blanchiment (Crim) a rendu ses premières conclusions. En mai, la commission Libertés civiles, justice et affaires intérieures de l’UE a demandé aux Etats membres de faciliter la confiscation des avoirs criminels. Elle leur a aussi conseillé de réutiliser les avoirs confisqués pour des projets d’utilité sociale. Qu’attend le gouvernement français ?

Ce n’est pas parce que la mafia existe toujours qu’il faut douter des moyens antimafias italiens

Voir confiscation dans le Petit dictionnaire énervé de la mafia

La maison du Jazz à Rome ancienne maison d'un gangster romain

Un commentaire souvent fait : « vous militez pour des outils antimafias italiens mais la mafia existe toujours en Italie » :

Réponse : « Vous avez raison de douter mais la confiscation administrative commence en Sicile en 1982.

30 ans après, la mafia sicilienne ne tue plus.

1 800 morts entre 1978 et 1982 et aujourd’hui rien.

Certes, la ‘Ndrangheta, la mafia calabraise, est encore puissante mais est-elle plus ou moins puissante depuis que la villa du boss Mazzaferro de Gioia Tauro est une caserne de Garde des finances (cf. Antimafia redistributive)?

La mafia calabraise est-elle plus au moins puissante que depuis que le café de Paris à Rome n’est plus au main du clan Alvaro? (cf. Antimafia redistributive )

La mafia calabraise est-elle plus ou moins puissante depuis qu’il y a une coopérative agricole sur les terre de la ‘ndrine Mammolitti (cf Antimafia redistributive)?

Est-elle plus au moins puissante depuis qu’il y un atelier de mode antimafia en Calabre avec un show room à Milan (immeuble confisqué à une clan cf. Antimafia redistributive ?)

Enfin, est-elle plus ou moins puissante depuis qu’il y a un centre handicapés dans la villa du clan Torcasio de Lamezia terme (cf. Antimafia redistributive )

Alors, la mafia est plus puissante avant ou après les mesures antimafias?

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