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Le capitalisme produit-il de la mafia?

Ce numéro de la revue Illusio dont la thématique est « Mafias et comportements mafieux » se donne pour objectif de comprendre quelles sont les relations entre ce que l’on nomme généralement le crime organisé et le système capitaliste…. cliquez sur le lien suivant pour avoir le compte rendu et le sommaire : publication indépendante
Il s’agit d’une publication scientifique très dense. Même si je n’ai pas tout lu, les articles de Jean de Maillard  (cf. L’arnaque) ou celui de Clotilde Champeyrache donne le ton. C’est du « sérieux »! Je me serai bien vu faire un papier sur « mafias italiennes et Calcio » au chapitre « l’honorable famille sportive » ou encore « l’Etat de droit produit-il de la mafia? » au chapitre « société criminelle »…  ce n’est que partie remise.
Il ressort de mes premières lectures que l’ouvrage tend à montrer la mafia comme une criminalité systémique, ce que je défends, cliquez sur les liens suivants :

L’Arnaque de Jean de Maillard

Par Thierry Colombié, interview exclusive de Jean de Maillard, vice-président du Tribunal de Grande Instance d’Orléans (France). Enseignant à Sciences Politiques (Paris), Jean de Maillard a écrit plusieurs livres sur la criminalité économique et financière dont « Un monde sans loi » chez Stock, un ouvrage référence sur le blanchiment d’argent – @ 30 avril 2010.

A la suite de la grave crise financière de 2008, et le terrible impact sur les Etats européens (Espagne, Grèce ou Portugal), « l’Arnaque de Maillard » pourrait devenir, comme en son temps le théorème de Pythagore, la référence universelle pour expliquer la déliquescence de la planète finance. Alors que les spéculateurs se délectent de la situation grecque, se frottant les mains à l’idée de voir plonger l’Euro et de fondre sur les autres Etats européens, Jean de Maillard explique comment et pourquoi les Etats ont favorisé la fraude à l’échelle internationale. Et ce n’est pas fini. Comme le dit, ici, en exclusivité l’auteur de « L’Arnaque : la finance au-dessus des lois et des règles » (Gallimard – avril 2010) : « Désormais, les fraudes sont réalisées à peu près exclusivement par les comptables, les directeurs financiers et les P-DG, les auditeurs, le tout sous le regard indulgent et distrait des organes publics de contrôle qui laissent faire avec indifférence. C’est à partir de ce moment qu’on entre vraiment dans l’arnaque dont je parle : le système lui-même produit les fraudes, comme mode de gestion de l’économie, en l’espèce l’économie du numérique essentiellement, mais ensuite de la finance dans son ensemble»

Lire l’interview ? Cliquez sur le lien suivant : http://www.thierry-colombie.fr/page.php?54

Article sur les femmes et la mafia

Les femmes et la mafa, article paru dans FEMMES 3000 mars 2010, numéro 40, sur le net (Femmes 3 000)

Les mafias italiennes sont toutes des sociétés machistes. Et pourtant, les femmes y sont de plus en plus nombreuses à faire parler d’elles. Si certaines se font plus mafieuses que les mafieux, d’autres se rebellent contre le système, faisant montre d’un courage hors du commun. Exploration de ces sociétés glauques avec Fabrice Rizzoli*.

« Une approche des femmes au sein de la mafia,met d’emblée en évidence trois catégories : les épouses traditionnalistes, qui sortent de l’ombre pour accomplir de plus en plus de tâches au profit de la mafia ; les femmes chefs de clan, rares encore ;  les femmes devenues collaboratrices de justice, terme improprement traduit par ‘repenties’, explique Fabrice Rizzoli.

« Tout mafioso se doit d’être marié et d’avoir des enfants, des garçons de préférence. L’épouse traditionnelle parfaite est celle qui ‘sert, obéit, ne voit rien, ne dit rien, mais sait tout’, pour paraphraser Claude Ducouloux-Favard**. Un rôle moins passif qu’il n’y paraît, car, les hommes étant le plus souvent  ‘au-dehors’, elles ont tout pouvoir sur les enfants auxquels elles transmettent les codes culturels mafieux : se défier de l’État et de la Justice, conférer le privilège du pouvoir aux hommes, savoir garder le silence, ne jamais transgresser l’omertà, savoir exercer la vengeance. Bien des femmes de mafieux restent attachées à cette culture qu’elles ont inculquée à leurs enfants. Certaines d’entre elles – appelées les ‘veuves noires’ en Campanie – n’hésitent pas à organiser une ‘vendetta’ pour venger leur homme ou un fils assassiné. Et beaucoup se désolidarisent de leur mari ou de leurs fils quand ils passent dans le camp des collaborateurs de justice. Pour se protéger d’éventuelles représailles, peut-être, mais par fidélité à leur mode de vie aussi, sans doute.

« Car elles sont de plus en plus actives dans le monde criminel. Ainsi, les femmes prennent soin des hommes en cavale, qui sont de plus en plus nombreux, compte tenu de l’amplification de la lutte anti-mafia en Italie. Ce sont elles aussi qui véhiculent la drogue. Il faut savoir que, dans les années 70, jamais un policier américain n’aurait fouillé au corps une Sicilienne, courrier de la Cosa Nostra, toute de noir vêtue. Maintenant, il y a des femmes-policiers, ce qui change la donne… Ce sont elles également qui, à Naples ou à Palerme, transportent les armes lors des règlements de comptes. Souvenez-vous, de cette première scène du film Gomorra, un contrat dans un salon de beauté : les armes des tueurs sont déposées dans le sac de la jeune fille, leur complice, ce qui limite les risques de fouille. Et puis, quand les hommes sont en prison et qu’il s’agit de ‘boss’, ce sont les femmes qui font circuler l’argent, qui prennent les ordres et les répercutent sur leur territoire. Car il faut bien que ‘le business’ continue !

« Comme il y a de plus en plus de mafieux en prison, comme certains boss sont à l’isolement, ces femmes en viennent à prendre des initiatives, y compris celle de donner l’ordre de tuer, comme des écoutes téléphoniques en apportent la preuve. Ces femmes qui prennent le pouvoir sont filles ou sœurs d’un boss, plus rarement une épouse ».

[Les femmes chefs de clan sont rares encore. « Mais terribles ! », rapporte Claude Ducouloux-Favard dans son livre. Ont beaucoup fait parler d’elles : Angela Russo, dite ‘Nonna Eroina’, la mamie de l’héroïne, organisatrice d’un trafic à 80 ans ; Anna Maza, veuve d’un boss, entourée d’un staff entièrement féminin, protégée par des femmes gardes du corps. Le clan d’Anna Maza était plus préoccupé de bien gérer ses « entreprises » que de prendre le pouvoir sur d’autres clans. Mais ses membres ont eu recours au crime quand il leur a fallu se préserver de réseaux concurrents, tous masculins. En 2008, aucune des femmes chefs de clan arrêtées, n’était devenue collaboratrice de justice, contrairement à bien des hommes.]

« Enfin, poursuit Fabrice Rizzoli, il y a des femmes battues par leur mafioso, des femmes trompées, alors que le code de la mafia impose qu’une épouse soit respectée et que sur le territoire où il exerce, on ne doit pas connaître de maîtresse à un mafioso. Il y a des filles qui se sentent dépréciées par rapport à leurs frères parce qu’on ne leur laisse pas accéder à des études supérieures alors qu’on pousse les garçons. Il y a des femmes qui ne supportent plus l’accumulation des deuils autour d’elles. Il y également des épouses amoureuses de leur mafioso et qui ne se détournent pas de lui lorsqu’il passe dans le camp des collaborateurs de justice. En bref, pour des motifs de révolte divers, des femmes sortent de la mafia en se plaçant sous la protection de la Justice avec laquelle elles acceptent de collaborer.

« Une telle démarche représente une rupture totale avec la famille, le milieu, l’obligation de changer de nom, de devenir une autre. Si Margherita Gangemi et son mari, Antonio Calderone, un repenti, ont fini par se rejoindre aux États-Unis pour commencer une vie nouvelle, la jeune Rita Adria s’est suicidée, éperdue de solitude, après l’assassinat du juge Paolo Borsellino, un drame qui a servi de trame au film La Sicilienne. cf. La Sicilienne rebelle


[Rappelant le cas de Margherita Gangemi, Claude Ducouloux-Favard rapporte que le juge Giovanni Falcone se trouvait pour la première fois face à une Sicilienne, épouse d’un mafioso, attachée à son mari auquel elle se montrait soumise, mais également en opposition au monde de la mafia. Et cette universitaire ajoute : « le juge réalisait que 1968 était passé par là et que des femmes pouvaient défier la mafia ».]

« Sans nul doute, la lutte exemplaire de l’Italie contre la criminalité organisée, avec, surtout, confiscation des biens des mafieux, réduit le pouvoir d’intimidation de ces derniers et favorise le développement d’une résistance jusque dans la société civile », tient à souligner Frabrice Rizzoli. Il faut relever à ce propos, l’action de trois femmes, Giovanna Terranova, Caterina Mancusa et Rita Costa, veuves de juges assassinés : elles ont été à l’origine d’une pétition officielle contre Cosa Nostra qui, en 1980, a recueilli environ 30 000 signatures en Sicile. Dans la foulée de ce succès, a émergé la première association de femmes à Palerme : l’Associazione donne contro la mafia. Des femmes qui, dans la société civile, ont su vaincre la peur.

Monique Raikovic

*Fabrice Rizzoli, Docteur en Sciences politiques, a consacré sa thèse à l’étude des mafias italiennes (cf.Mafias italiennes et relations internationale)

**Claude Ducouloux-Favard – « La Mafia italienne – Des vergers d’agrumes aux marchés globalisés »,, éd. Arnaud Franel- avril 2008. (cf. Le livre pour les étudiants)

Mondialisation : arrestation à Rome d’un mafieux calabrais après la fuite des Africains

Le « latitante » (en cavale), Domenico Belloco a été arrêté à Rome, la capitale de l’Italie, état de droit (cf. Italie : état de droit!). Il est l’héritier le plus actif de la ‘ndrine (famille mafieuse) Belloco qui domine la zone de Rosarno. Domenico gérait le trafic de drogue, d’armes et le racket. Il avait pour mission de mettre en place de nouvelles alliances avec d’autres familles mafieuses. En effet, les tensions avec le clan Pesce, allié des Belloco depuis 30 ans, sont importantes (cf. Vengeance « transversale » à Rosarno?).

Cela n’a pas empêché les clans de Rosarno de chasser les immigrés qui travaillaient depuis 10 ans comme des esclaves (photo à gauche) dans les plantations d’agrumes (cf. article de La croix sur les évènements de Rosarno ).

Une action à mettre en parallèle avec la chasse des Roms organisée à Naples et le meurtre des 6 Africains l’année dernière :

Le livre pour les étudiants

Claude Ducouloux-Favard, avec « La mafia italienne (Des vergers d’agrumes aux marchés globalisés) », offre une publication intéressante. Ce livre, écrit à partir de sources italiennes et très explicatif, évite les lieux communs. Il est en outre idéal pour les lycéens (nombreux à me contacter) et qui font un TPE sur la mafia.

Pour en savoir plus : La mafia Italienne

PS : page 42,  Lucky Luciano est condamné pour proxénétisme est non pour fraude fiscale (confusion possible avec Al Capone.)

Italie : état de droit!

Regardez ce que propose le très informatif site crimorg.com. En quelque jours, les forces de l’ordre et les magistrats démontrent que l’Italie est un état de droit. Seul bémol, le pouvoir en place veut permettre la vente de bien confisqués aux mafieux. Certes 75% des biens confisqués aux clans ne sont pas réutilisés par l’Etat (cf. La confiscation : enjeu politique majeur). Pour changer cet état de fait, il faudrait une agence unique pour administrer ces biens contre les 17 qui existent aujourd’hui. Enfin, revendre les biens confisqués au mafieux c’est permettre aux mafieux de les racheter tant ils disposent d’une grande disponibilté financière (cf. Des statistiques à la réalité de la lutte antimafia) !

1. Sicile : arrestation d’un important Boss

Publié sur Crimorg.com le 03.12.2009

Les carabiniers ont procédé à l’interpellation de Francesco De Vita (né en 1954) dans la campagne près de Marsala (extrême-ouest de l’île). Placé sur la liste des 100 fugitifs les plus recherché, le parrain était en cavale depuis 2000, suite à sa condamnation à perpétuité pour association mafieuse et homicide. Son fils Gaspare avait été arrêté il y a quelques semaines pour trafic de cocaïne et de cannabis et fausse monnaie. Francesco De Vita est considéré comme le chef de la Famille de Marsala et comme un membre important de la Cosa Nostra de la province de Trapani.
(2 décembre 2009 / Agences)

2. Sicile : arrestations de proches du Boss Bernardo Provenzano

Publié sur Crimorg.com le 01.12.2009

bagheriaLa police de Palerme a interpellé 11 personnes, essentiellement dans la région de Bagheria, accusées d’avoir aidé à la cavale de Bernardo Provenzano, jusqu’à son arrestation du « boss des boss » en avril 2006. Parmi les personnes arrêtées figure Simone Castello, 60 ans, un des « facteurs » de Provenzano, en charge de récupérer les pizzinis du Boss. Castello, déjà condamné pour association mafieuse, a été arrêté à Madrid où il gérait une société d’import-export de fruits et légumes.
(1er décembre 2009 / La Repubblica – Italie)NDLR : Les pizzinis sont devenus le mode de communication préféré des grands Boss. Se méfiant des moyens de télécommunication moderne, les parrains utilisent donc des petits bouts de papiers où sont écrits des messages, souvent en code. Plus sur, ce moyen a toutefois l’inconvénient de la lenteur, le pizzini devant passer de main en main (d’hommes de confiance) avant d’arriver à son destinataire, sans compter le chemin inverse pour la réponse… Voir le livre d’Andrea Camilleri

3. Une église de Naples rackettée par la Camorra

Publié sur Crimorg.com le 01.12.2009

Don Mario Ziello, prêtre de la paroisse Santa Maria del Carmine alla Concordia, du quartier populaire espagnol de Naples, a dénoncé lors de son homélie dominicale, la tentative d’extorsion dont son église a été l’objet. Les ouvriers, travaillant sur le chantier de réfection de la sacristie, ont été approchés par deux hommes qui ont réclamé « l’impôt de Noël » pour le clan local. Après avoir dénoncé ce racket en chaire, le prêtre a porté plainte devant la police.
(1er décembre 2009 / Agences)NDLR : En plus du racket « ordinaire », les mafieux ont pris l’habitude de demander un « pizzo » supplémentaire (en argent ou en nature) à l’occasion des fêtes de la Vierge, de Noël ou lors de fêtes locales. Ce « bonus » est en théorie destiné aux membres incarcérés et à leurs familles.

4. Vaste opération contre la Sacra Corona Unita de Bari

Publié sur Crimorg.com le 01.12.2009

savinuccioSavinuccio ParisiLa Guardia di Finanza a mené une vaste opération contre deux clans de la mafia de Bari, permettant l’arrestation de 83 personnes et la mise sous séquestre de biens estimés à 220 millions d’euros. En tout, 129 personnes ont été inculpées. Les accusations portées sont : association mafieuse, tentative d’homicide, fraude aux enchères, usure (jusqu’à 300% d’intérêt), blanchiment et trafic international de stupéfiants (en liaison avec des trafiquants serbes basés à Milan). Parmi les mafieux arrêtés figurent Savino « Savinuccio » Parisi (chef du clan homonyme) et Antonio Di Cosola (chef du clan Di Cosola-Strisciuglio). Des directeurs de banques, des fonctionnaires, des avocats et des élus locaux ont également été arrêtés. Ainsi, l’ancien maire-adjoint de Valenzano (banlieue sud de Bari), Donato Amoruso, et le conseiller municipal Vitantonio Leuzzi sont accusés d’avoir favorisé le clan Parisi dans l’attribution de contrats publics dans le cadre de la construction du « Centre Intégré Universitaire » (d’une capacité d’accueil, à terme, de 3.500 étudiants). Onofrio Sisto, ancien Vice-Président de la Province de Bari, et Elvira Savino, députée PDL (Popolo della Libertà, au pouvoir) des Pouilles, sont également impliqués dans cette affaire.
Parmi les biens placés sous séquestre on relève : « Paradisebet Ltd » (une société de bookmakers basée à Londres, effectuant des paris sur le football, le tennis, la Formule 1, les grands prix de moto, le ski alpin, le basket, le rugby et le football américain) et pour 3 millions d’euros d’actions de la société italienne « Sport&More » (géant de l’équipement sportif, faisant un chiffre d’affaires de 130 millions d’euros, dont 30% en dehors de l’Italie).
(1er décembre 2009 / La Gazzetta del mezzogiorno – Italie)

Lobbying antimafia à Bruxelles

Le mardi 1er décembre, le groupe Flare (Freedom, Legality and Rights in Europe),  organisait une manifestion devant le Conseil des ministres de l’Union européenne à Bruxelles. Flare est le premier réseaux (issu de la société civile) contre le crime organisé  transnational.

La présence de Flare dans la « capitale » de l’Union avait pour but de convaincre les ministres de la justice des 27 pays de l’Union réunis en Conseil que les fonds confisqués au crime organisé doivent être utilisés à des fins sociales. Ce dispositif législatif utilisé en Italie donne des résultats encourageants (cf. De la saisie à la confiscation; de la mafia à l’Etat?).  Par exemple, la maison confisquée au chef de la mafia sicilienne, Salvatore Riina (cf. Leçon de communication mafieuse par Toto Riina) est aujourd’hui un centre culturel (cf. la Croix). De point de vue ciminologique, ce procédé est très efficace parce qu’il prive les mafieux de consensus social (cf. Les ‘ndrines et le consensus social).

Dans la rue, les militants ont joué à CONFISCOPOLIS, un jeu de société avec lequel on confisque des biens mal acquis.

Comme les photos en témoignent, la manifestation (autorisée par les autorités) fut une réussite et ce en dépit d’une première intervention de la police qui nous a fait  remballer. Le magistrat Luigi de Magistris nouvellement élu député européen, les médias, la police… et surtout le commissaire Jacques Barrot ont entendu le message. Ce dernier en particulier s’est déclaré favorable à la réutilisation des biens confisqués au crime organisé à des fins sociales (cf. déclaration)

Quartier général Confiscopolis
Confiscopolis
Le quartier général avait autorisé la manifestation jusqu’à 15h mais sur le terrain, les agents de police avaient un ordre de mission qui indiquait 13h. Il aura fallu l’intervention d’un officier de la police des renseignements généraux pour recommencer la manifestation.

Luigi De Magistris

Le député Luigi De Magistris
Press Commission européenne

Etats généraux de l’antimafia 2009

Dans le cadre de ma participation aux Etats-généraux de l’Antimafia à Rome (2009), voici la communication proposée :

LE TRAFIC DE CANNABIS EN FRANCE (english)

De l’inefficacité des politiques répressives dans un pays où la consommation de cannabis s’est banalisée alors que les peines pour consommation de stupéfiants sont les plus sévères d’Europe.

Préambule :
La jeunesse française n’est pas « à la dérive » mais la consommation du cannabis s’est banalisé et ce malgré la progressive augmentation des saisies de cannabis au cours de ces 20 dernières années.

1. Les faits :

Les sources concernant les filières du trafic de cannabis (la résine et non l’herbe) en France sont peu nombreuses. Elles proviennent de l’OCTRIS (l’office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants) et des Nations Unies. Elles sont essentiellement de nature quantitative parce qu’elles sont établis à partir des saisies1.

De ce point de vu, la France se place à la seconde place de l’Union européenne derrière l’Espagne (670 tonnes saisies en 2005) pour la quantité de cannabis saisi2 :

Les chiffres des saisies :
1990 : 21 tonnes
1997 : 67 tonnes
2004 : 107 tonnes
2005 : 85 tonnes
2007 : 50 tonnes
2008 : 74 tonnes

La quasi totalité de la résine provient du Maroc (pays qui produit 80% de la résine de cannabis fumée en Europe).

Cependant, seule 15% de la résine de cannabis qui arrive en France provient DIRECTEMENT du Maroc3. Les 85% restant proviennent d’Espagne en raison de la position géographique de l’Espagne qui est une lieu de passage privilégié.

La résine suit le parcourt suivant :
Elle est produite dans la région du Rif4 puis arrive dans les ports d’Agadir et de Casablanca pour emprunter la voie océanique ou dans les ports de Tanger et de Nador pour emprunter la voie méditerranéenne.
15% de la résine arrive directement dans les ports du Havre, de Nantes, et de Bordeaux. Le reste de la résine arrive en Espagne par tous les moyens navales possibles (barques de fortune, navires marchands, mini hors-bords…)

Une fois le 85% de la marchandise restante arrivée en Espagne, les trafiquants la font voyager  par la route. La majeure partie du cananbis transitent par camion « T.I.R. ». En effet, 57 tonnes saisies de cannabis sur les 85 de 2005 l’ont été sur ces camions.

Les autres tonnes sont en partie acheminées par les « go fast » qui sont un des moyens d’approvisionnement des trafiquants des quartiers dit sensibles en France. Les « go fast » sont les moyens d’acheminement les plus médiatisés ce qui participe à la stigamatisation des « cités » de banlieues.5

2. Le problème : une répression qui concerne essentiellement la vente au détail

Le cannabis est la drogue la plus trafiquée. Il recouvre à lui seule la moitié des interpellations pour trafic de stupéfiants6. Par exemple en 2008, 71% des interpellations concernaient le trafic de cette substance7.

Le problème est que les saisies concernent dans 8 cas sur 10, des quantités inférieures à 20 grammes!

La majeure partie des arrestations concernent des cas de revente au détail voir des personnes qui consomment et revendent, soit 67% des 13.000 trafiquants8.

En 2008, en France les interpellations pour trafic de cannabis par rapport aux précédentes années sont en forte augmentation avec 19.685 interpellations9.

Ce sont donc les réseaux locaux les plus exposés à la répression. Il existe peu de sources quant à ces réseaux, même si une étude propose une typologie en trois catégories10 :

-Le modèle familial
-Le modèle « entrepreneurial »
-Le réseau de proximité, constitué souvent de cessions gratuites.

D’après cette étude, le réseau de proximité est le plus répandu au sein de la jeunesse française, même si ces trois réseaux sont perméables. Les réseaux de proximité peuvent se transformer en modèle d’entreprise et vice et versa.

Ces réseaux locaux d’approvisionnement montre une grande flexibilité face à la répression. En cas de démentellement d’une structure, la capacité de régénération est très forte.

Le chiffre d’affaires du trafic de cannabis en France est évalué entre 745 et 832 millions d’euros pour l’année 2005. Cette estimation est calculée à partir d’une étude croisée selon les déclarations des sommes dépensées par les consommateurs.11

Pour conclure :

Du point de vue de la santé publique, la banalisation est un problème sérieux. En dépit d’une forte répression, le cannabis est devenu un produit très disponible (très présent sur le marché) et très accessible (facile à trouver).

Du point de vue géo-criminel, derrière les petits et moyens réseaux d’approvisionnement qui subissent la répression, se  cache la criminalité organisée française basée en Espagne puisque 3/4 du cannabis saisi, passe par l’Espagne via camions.12
Comme elle est organisée, la répression enrichit le crime organisé français au lieu de l’affaiblir.

Quelques pistes pour améliorer la situation en cliquant su ce lien : Contre les mafias : la régulation publique de la drogue

1Michel Gandilhon, Abadalla Toufic, Helène Martineau, Povenance et fillière de trafic in Cannabis, (données essentielles sous la direction de jean Michel Costes (2007) Observatoire Franaçais des Drogues et des Toxicomanies, 2005, p. 66_72, www.ofdt.fr
2Octris (Office Central de Répréssion du Trafic Illicit de Stupéfiants)
3OCTRIS, Usage et trafic des produits stupéfiants en France en 2005, Paris, Ministrère de l’Intérieur et de l’aménagement du territoire, Direction nationale de la police nationale, Direction centrale de la police judiciaire, 2006, 123 pages.
4Région du Nord du Maroc où se concentre la culture du cannabis, couvre environ 20.000 m², ce qui représente 2.7% de la superficie totale du royaume du Maroc, et 6% de la popultaion. A cheval sur 5 provinces, elle est traversée d’est en ouest par la chaîne montagneuse du Rif.
5D’après les groupes d’intervention régionaux (GIR), le dispositif anti-traffic créé en 2002, 5.4 tonnes ont été récupérées depuis 4 ans dans les « banlieues » françaises
6Voir note de bas de page n°3
7http://www.ofdt.fr/ofdtdev/live/produits/cannabis/offre-1.html#aff_rech
8En 2005, une proportion qui reste stable depuis la fin des années 1990
9http://www.ofdt.fr/ofdtdev/live/produits/cannabis/offre-1.html#aff_rech
10S. Aquatias, « Achat et vente de cannabis au niveau local », in : Cannabis: Qules effets sur le comportement et la santé, Paris, INSERM, Coll Expertise Collective, 2001, p. 403-415
11Voir note de bas de page n°1. Pages 74-75
12Voir note de bas de page n°1. Page 64

Eglise et mafia

La Conférence Épiscopale Italienne, réunie à Assises, a déclaré que les membres d’organisations mafieuses sont automatiquement excommuniés de l’Église catholique. Cela voudrait dire que les mafieux sont excommuniés sans qu’il y ait besoin d’autres actes de la part de l’Église. Et bien, Non! L’église doit excommunier les mafieux et leur complice en motivant sa décision.
Le problème est que l’Église et la mafia partagent une valeur commune (une seule), celle de croire à un ordre supérieur,  au dessus de l’état de droit. Ainsi, de nombreux prêtres acceptent les confessions des mafieux sans les inciter à changer de style de vie. Car quitter la mafia veut dire collaborer avec la justice et devenir un citoyen c’est à dire  accepter  la laïcité, l’avortement, la pillule, le préservatif… et cela l’église n’y croit pas.
De nombreux prêtres se taisent face aux mafieux. Certains les marient (cf. Bénédiction vaticane à la ‘Ndrangheta). D’autres mènent un combat social contre la mafia. Ils sont en premières lignes, sont assassinés (Pino Puglisi en 1993 et Don Diana en 1994) et sont peu soutenus par le Vatican.
Tant que le Vatican, en plus de faire le ménage dans ses banques (cf. scandale), n’acceptera pas la supériorité de la loi des hommes sur la loi divine, il ne pourra pas donner à ses prêtres des consignes antimafias sans ambiguités.

Ndr : Le 9 mai 1993, le Pape Jean-Paul II avait condamné la mafia lors d’une messe à Agrigente. Cosa nostra sicilienne répond le 28 juillet 1993 en posant deux bombes  à Rome, visant l’église Saint Georges du Vélabre et surtout la Basilique Saint Jean de Latran (siège ecclésiastique officielle du Pape et considérée comme la « mère de toutes les églises du monde »). Ces attentats font parti d’un plan de déstabilisation globale de l’Etat (cf. 12 janvier 2002, un étudiant et un colloque sur les attentats de 1992-1993).

12 janvier 2002, un étudiant et un colloque sur les attentats de 1992-1993

La presse française s’enflamme (cf. Richard Heuze, le Figaro du 19/10/2009 : « Quand la mafia tentait de négocier avec Andreotti« ). Elle découvre que la mafia sicilienne a posé des bombes en 1992-1993 (cf. Bon anniversaire Giovanni) et dialoguer avec des politiciens pour obtenir leur faveur…. (cf. Leçon de communication mafieuse par Toto Riina). Ensuite, l’article ne dit pas que la Cour de cassation, dans sa décision du 15 octobre 2004 a condamné Giulio Andreotti pour le délit d’association mafieuse mais les faits (antérieurs à 1980) sont prescrits.

Le 12 janvier 2002, déjà, au cours  d’un colloque organisé au Sénat par l’association Démocraties, un « jeune » doctorant expliquait que la première République italienne mourante subissait des attaques mafieuses afin de faire pression sur l’Etat et sa nouvelle classe politique (cf. La Sicilienne rebelle).

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